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L’« inclusion », une porte ouverte sur les entraves et les hiérarchies sociales

Histoire d’une notion. Appliqué à des contextes et des champs très divers, l’adjectif inclusif peut sembler difficile à cerner de prime abord. Il semble avoir été mobilisé en premier lieu avec l’école inclusive, pour désigner des politiques éducatives visant à rendre accessibles les savoirs et la connaissance à tous les élèves, et plus spécialement à ceux en situation de handicap. Puis est venu le design inclusif, reflet de la volonté de concevoir et d’aménager les appareils électroniques, les infrastructures et les espaces publics pour qu’ils soient facilement utilisables par tous – notamment les personnes âgées. C’est ensuite l’écriture inclusive qui a fait couler beaucoup d’encre : elle désigne l’ensemble des moyens linguistiques et syntaxiques utilisés pour assurer une égale représentation des deux genres dans la langue française.
Mais qu’est-ce exactement que l’inclusion, cette notion qui se cache derrière son omniprésent adjectif ? « L’inclusion désigne la capacité de participation d’un individu dans une sphère sociale, un lieu, un collectif, détaille Antoine Printz, chercheur en sociologie. En ce sens, une société inclusive, une institution inclusive ou une pratique inclusive mettent des choses en place pour ne pas laisser des individus exclus. » A la fois processus et objectif à atteindre, la notion signale un changement dans la façon d’articuler le rapport de l’individu à un collectif.
En effet, pour en arriver à raisonner en termes d’inclusion, il a d’abord fallu penser son envers – l’inclusion étant avant tout le contraire de l’exclusion. « La notion d’exclusion sociale apparaît autour des années 1980 comme une nouvelle forme pour désigner ce qu’on appelle classiquement la “question sociale” », explique Antoine Printz : à cette époque, on commence à utiliser l’expression pour décrire des problématiques très hétérogènes – pauvreté, discrimination, toxicomanie, migration, handicap, mal-logement, sans-abrisme, isolement social, monoparentalité… Le changement de vocable n’est pas anodin : les difficultés rencontrées par certains ne sont plus lues comme résultant, par exemple, d’un rapport de force entre classes, mais d’une incapacité à participer à la société sur les plans économiques, civiques, culturels et spatiaux.
Cette nouvelle approche de la question sociale implique, du même coup, de nouvelles manières de la résoudre – et de nouvelles idées quant à savoir qui doit s’y atteler. Dans le champ éducatif, où la thématique de l’inclusion commence à être mobilisée au milieu des années 2000 et vient s’opposer au modèle de l’intégration qui prévalait jusqu’alors : « Là où l’intégration suppose que l’individu s’adapte à la société et à ses normes, l’inclusion suggère que c’est la société qui doit s’adapter à l’individu », analyse le philosophe Paul-Loup Weil-Dubuc, chercheur à l’Espace éthique Ile-de-France.
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